L'ESSENTIEL La question de l'exploitation de l'image des biens ne peut être réduite à la question de la richesse économique. Le propriétaire peut tout simplement revendiquer à l'encontre du professionnel de l'image, un droit à la tranquillité, un souci de rétablir une certaine vérité, ou faire valoir le respect de sa personne. En outre, certains professionnels de l'image peuvent être animés d'une volonté de diffusion d'un savoir. L'image d'un bien peut être un outil de communication qu'il est important de protéger. C'est dans la confrontation des valeurs économiques et sociales que repose tout l'intérêt d'une étude sur la question. C'est pourquoi, le principe est bien ici la liberté de l'activité de l'exploitation de l'image des biens qui a été un peu perdue de vue avec la jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de cassation. Cette liberté dont on doit protéger la prospérité à l'aide d'outils juridiques spécifiques, n'est ni générale, ni absolue. L'activité d'exploitation peut en effet être l'origine de la création d'un trouble de la propriété ou de la personne, qu'il appartient au professionnel de l'image de supporter.
1er avril 2005 - Légicom N°34
0 mots
Veuillez patienter, votre requête est en cours de traitement...
(2) Les premières lignes de cette chronique sonttirées de notre ouvrage, L'exploitation de l'imagedes biens, Guide Légipresse, PUF/VictoiresEditions à paraître.
(3) M.-J. Mondzain, Le commerce des regards,Seuil, L'ordre philosophique.
(4) Cf. les exemples de revendications despropriétaires développées dans le journal LeMonde du 27 décembre 2002.
(5) G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 1996, Image , p. 415.
(6) Et c'est bien ce mouvement qui appellel'intervention juridique.
(7) Cass. civ. 1re ch., 10 mars 1999, JCP, 1999,II, 10078, note P.-Y. Gautier. Bien que cettesolution ait été aujourd'hui remise en cause parl'Assemblée plénière, 7 mai 2004, D., 2004, J.,p. 1545 et nos observations.
(8) C. Bigot, La liberté de l'image entre sonpassé et son avenir , 2e partie, Du droit desavoir au droit de voir, Légipresse, 2001, n° 183-II-81.
(9) Si l'on veut bien faire abstraction del'imprécise proposition de loi visant à donner uncadre juridique au droit à l'image déposée le16 juillet 2003 à l'Assemblée nationale, et notrecommentaire, J.-M Bruguière et B. Gleize, D. ,2004, Point de vue, p.2643.
(10) Automatiquement en effet, avec cettejurisprudence ; les professionnels étaient en fautede ne pas avoir sollicité l'autorisation despropriétaires.
(11) TI Nancy, 21 juin 1991, Gaz. Pal., 1992,Sem 1, p. 232.
(12) P. Kayser, L'image des biens , D. , 1995,Doct., p. 291.
(13) A la une du journal Le Monde du 27 décembre2002, le dossier consacré à cette question.
(14) L'image menacée ?, Forum Légipresse,4 octobre 2001, Victoires-Editions.
(15) Cette expression est à attribuer auphotographe Patrick Bard (à propos alors del'image des personnes).
(16) Le Monde, 29 mars 2003, Lesphotographes face au piège du juridiquementcorrect .
(17) Sur ces difficultés cf. Zoom sur l'image desbiens. La création photographique en danger ,A. Fusco-Vigné, et B. Gleize, Annales de lafaculté de droit d'Avignon, 2000, p. 63.
(18) L'image des personnes est-elle un possibleobjet de commerce au sens de l'article 1128 duCode civil ? Sur cette discussion, cf. L. Marino,CCE, Mars 2003 p.10. Pour l'image des biens, leproblème était différent (avant le revirement dejurisprudence du 7 mai 2004) puisque l'onadmettait bien en amont l'existence de la propriété.
(19) J. Cayron, La situation du photographedans les contrats de cession de droits d'auteur ,Légipresse, 2003 n°205-II-129.
(20) Citée par J. Cayron, chron. précit.
(21) A. Latreille, L'appropriation desphotographies d'uvres d'art : éléments d'uneréflexion sur un objet de droit d'auteur , D.,2002, Chron., p. 299.
(22) Sur ce point, V. le rapport gouvernementaldestiné à Préparer l'entrée de la France dans lasociété de l'inform@tion , programme d'actiongouvernemental, Premier ministre, serviced'information du gouvernement, 1997, p. 22.
(23) Paris, 26 septembre 2001, CCE, 2002,comm. 18, obs. C. Caron.
(24) A. Latreille, L'appropriation desphotographies d'uvres d'art : éléments d'uneréflexion sur un objet de droit d'auteur , préc.,p. 299.
(25) Pour reprendre l'expression de M. Latreilleop. cit.
(26) Pour de plus amples développements surcette question, V. M. Buydens, La protection dela quasi-création, Larcier, Bruxelles, 1993,p. 192 et s.
(27) La directive du 29 octobre 1993 (art. 6)relative à l'harmonisation de la durée deprotection du droit d'auteur et de certains droitsvoisins réserve en effet la possibilité, pour lesÉtats membres, de prévoir la protection d'autresphotographies que celles traditionnellementappréhendées.
(28) Aix-en-Provence, 20 janvier 2004, CCE,.2004, comm. 37, obs. C. Caron.
(29) Nous verrons au cours de nosdéveloppements que le juge protège en effetsouvent la personnalité au moyen du droit depropriété.
(30) Que l'on relise l'admirable ouvraged'Emmanuel Mounier, De la propriété capitalisteà la propriété humaine, 1936, pour qui lapropriété ne peut prendre un sens que dans uneimprégnation de l'objet par la personne. Cettephilosophie reçoit, souvent discrètement, debelles consécrations. Ainsi la Cour européennedes droits de l'homme (CEDH, 24 avril 1998,RTD Civ., 1998 p. 996 obs J.-P Marguénaud) at-elle pu juger que la destruction d'un logementen Turquie, marquait, au-delà d'une atteinte aurespect des biens, un mépris pour les sentimentsdes propriétaires caractéristiques de « traitementsinhumains » au sens de l'article 3 de laConvention européenne. Le bien qui fait corpsavec la personne en quelque sorte. Voilà peutêtrepourquoi l'on devrait nuancer plusl'opposition de la propriété à la personne.
(31) Sur les références de cet important arrêt cfinfra.
(32) F. Zénati, RTD Civ., 1999, p. 860.
(33) préc., p. 868.
(34) Si l'on veut bien faire abstraction de la vieilledécision du 27 mai 1842 (sur cette décision, cfinfra) dans laquelle M. Zénati voit l'arrêt fondateur.
(35) Trib. Com. Meaux, 7 mars 1905, confirmépar Paris, 27 avril 1906, Annales, 1907, p.16.
(36) Bordeaux, 16 octobre 1995, inédit.
(37) Caen, 18 juin 1996, inédit.
(38) Sur toutes ces confusions, cf. notre ouvrage,op. cit. note n°1.
(39) Très significatif (TGI Paris, 13 septembre1989, inédit) : Attendu que le propriétaire d'unimmeuble s'il est, en vertu de son droit de jouirde sa chose de la manière la plus absolue, fondéà s'opposer à ce que des photographies desparties non visibles de l'extérieur en soientprises sans son autorisation, ne peut toutefoisprétendre à une réparation qu'à la condition dedémontrer soit une atteinte à sa vie privée, soitl'existence d'un préjudice se trouvant dans unerelation de cause à effet avec la réalisationfautive des clichés . On ne comprend paspourquoi si le propriétaire ne peut agir que dansle cadre de l'article 1382 et 9 du Code civil, ilest important de rappeler que le droit depropriété permet à celui-ci de s'opposer à. Ledroit de propriété refoule ici les autresfondements.
(40) Cass. civ 1re ch., 25 janvier 2000, et notrecommentaire Légipresse, 2000, n° 171-II-60.
(41) Cass. civ 1re ch., 2 mai 2001, et nosobservations, LPA, 22 août 2001.
(42) Rouen, 31 octobre 2001, RJDA, 2002, n° 447.
(43) En ce sens, TGI Paris, ord. réf., 5 avril 2001,qui sollicite la propriété alors que la valeurprotégée est morale, Légipresse, 2001, n° 182-I-69.
(44) TGI Clermont-Ferrand, 23 janvier 2002, D.,2002, J., p. 1226, note J.-M. Bruguière, CCE,avril 2002, p. 15, note C. Caron ; Légipresse,2002, n° 191-III-84, note E. Derieux.
(45) Paris, 19 février 2002, JCP, 2003, II, 10073,note J.- M. Bruguiere.
(46) Ass. Plén., 7 mai 2004, D., 2004, J.,p.1545, note J.-M. Bruguière et E. Dreyer, JCP,2004, II, 10 085, note C. Caron.
(47) Cass. civ 2e ch., 5 juin 2003, D., 2003, J.,p. 2461, note E. Dreyer.
(48) Cass. civ 3e ch. 24 octobre 1990 Bull civ III,n° 205.
(49) Le visa de la cassation représente le, ou lestextes, généralement en tête des décisions, quecite la Cour afin de fonder sa solution. Ici, laCour n'en vise aucun.
(50) Parmi les arrêts de la Cour de cassation, ondistingue généralement les arrêts de rejet (dupourvoi) qui confirment la solution des juges dufond qui ne comportent généralement aucuntexte dans le visa et les arrêts de cassation (quiremettent en cause la décision) qui, encontrepoint visent une disposition.
(51) Une fois pour toutes le Parlement fait laloi, l'administration fait les règlements et nostrois grandes juridictions font la jurisprudence.Mais la doctrine fait le système . P. Jestaz,C. Jamin, L'entité doctrinale française , D.,1998, J., p.171.
(52) Sur cette démonstration, v. notre chroniquesous la décision du 7 mai 2004 avec BérengèreGleize, Légipresse, 2004, n° 213-III-117.
(53) Cass. civ. 1ère ch., 13 janvier et 10 février1965, Gaz Pal., 1965, sem. 1, p.236. Dans lemême sens, Trib. Civ. de Caen, 28 avril 1929,La loi, 11 octobre 1929.
(54) Paris, 18 février 1972, RIDA, 1972, p. 214.
(55) L. Cadiet et P. le Tourneau, Rep. Civ.Dalloz, Abus de droit , n° 35.
(56) F. Zénati, Du droit de reproduire lesbiens , D., 2004, Doct., p. 962.
(57) Le bien clos suppose nécessairement dansson accès l'autorisation du propriétaire (faute dequoi il y aurait violation de domicile). Nousraisonnons ici sur la base de l'hypothèse d'unbien visible du domaine public.
(58) Ou bien encore peut-être la maison de notrepropriétaire vu plus haut qui serait embellie demanière telle qu'elle serait susceptible d'uneprotection par le droit d'auteur. Sur cettepossibilité, TGI Valence, 26 avril 1973, Gaz.Pal., 1974, sem.1, 25, qui considère que « ladécoration et l'installation d'un salonconstituent une création originale et personnellede leurs auteurs ».
(59) Paris, 19 juin 1979, inédit.
(60) D. Amson, Le droit à l'image et la rue ,Légipresse, 2000, n° 175-II-106.
(61) Trib. com. Seine, 7 mars 1861, DP., 1861, 3,p. 32. Antérieurement encore cf. supra.
(62) Le dossier du Monde du 27 décembre 2002, La privatisation de l'image menace laphotographie .
(63) Rabat, 12 décembre 1955, Gaz. Pal., 1956,sem.1, p. 232.
(64) On retrouve ainsi la même formule, motpour mot, dans la décision de la Cour d'appel deParis du 19 juin 1979, op. cit. Dans l'affaire dela Géode, le juge souligne que « la loi du 11mars 1957 n'a prévu aucune disposition venantrestreindre la protection des droits relatifs auxuvres d'art situées dans un lieu accessible aupublic et qu'il appartient en conséquence auxseuls titulaires de ces droits de consentir à leurreproduction ».
(65) TGI Strasbourg, 10 février 1965, D., 1966,J., p. 425 ; en appel, Colmar, 22 juin 1966, D.,1966, Somm., p.98.
(66) Cass. com., 15 mai 1968, D. ,1968, J., p.697.
(67) La jurisprudence est ici constante ; Paris,15 mai 1970, D., 1970, J., p. 466 , concl.Cabannes. Les décisions antérieures à la loi du17 juillet 1970, dont celle-ci, sont rendues sur lefondement de l'article 1382 du Code civil.
(68) Sur cette jurisprudence et son application àl'exploitation de l'image des biens, notreouvrage op. cit. supra note n° 1.
(69) J. Mestre, La protection indépendante dudroit de réponse, des personnes physiques et despersonnes morales contre l'altération de leurpersonnalité aux yeux du public , JCP, 1974, I,2623 qui distingue des altérations directes etindirectes.
(71) Sur ce point, voir M. Cornu et N. Mallet-Poujol, Droit, uvres d'art et musées, CNRSéditions, 2001, notamment n° 552 et s.
(72) Paris, 18 décembre 1972, RIDA, 1972,p. 215. Voir également, pour le même châteauque dans l'affaire Bernard Buffet, TGI Paris,27 septembre 1976, RIDA, 1976 p. 160.
(73) Sur ce revirement cf. supra.
(74) Trib. Com Seine, 7 mars 1861, DP., 1861, 3,p 32. Antérieurement, par exemple, Paris, 5 juin1855, DP., 1857, 2, p.28 ; le juge établissait unedistinction entre les personnes et les biens. Lareproduction d'un monument étaitnécessairement dans le domaine public, celle dela personne faisait l'objet d'une propriétéprivée' et supposait en conséquence uneautorisation.
(75) Trib. Seine, 15 février 1952, Gaz. Pal.,1952, sem. 1, p.16.
(76) M.-J Mondzain, Le commerce des regards,Seuil, L'ordre philosophique.