L'ESSENTIEL Le mouvement de concentration initié dans les années 1980, qui a consacré la création des "majors" ces cinq plus grandes entreprises qui détiennent ensemble environ 80 % du marché de la production et de la distribution de disques en France comme en Europe, ne semble pas encore achevé. Dans un contexte de crise du marché du disque on peut s'interroger sur l'efficacité des concentrations pour faire face à cette concurrence sévère entre maisons de disques mais aussi entre les maisons de disques et les distributeurs et enfin entre les médias traditionnels de diffusion musicale et les médias émergents. Premier effet horizontal d'une concentration entre maisons de disques : la création d'un catalogue unique. Souvent dénoncée par les indépendants, accusée d'être une source d'appauvrissement culturel, la création d'un catalogue unique est-elle finalement vraiment stratégique? Les projets les plus récents l'ont en tout cas exclue, relativisant ainsi les avantages des effets horizontaux sur le marché amont. C'est à propos des effets verticaux des concentrations recherchant une intégration production-distribution-diffusion que les opposants à des opérations de fusion en cours comme celle entre Sony et BMG, émettent le plus de réserves. Le droit communautaire de la concurrence modernisé dans cette matière comme le droit français en matière d'interdiction des pratiques anticoncurrentielles, devraient être en mesure d'apporter des réponses adaptées à ces interrogations et les garanties nécessaires face à la création de ces superpuissances multinationales.
LA PRODUCTION ET LA DISTRIBUTION des disques en Europe sont essentiellement assurées par cinq entreprises, appelées majors, ayant connu ces dernières années des adaptations importantes, les menant à détenir aujourd'hui environ 80 % d'un marché mondial de la production phonographique en pleine mutation.Ainsi, de nombreuses maisons de disques ont disparu dans les années 1980 et 1990 (Barclays rachetée par Polygram (1), Musidisc rachetée par Universal, Carrère et Erato rachetées par ...
Christophe PECNARD
Associé Avocat à la Cour, NomoS
1er septembre 2004 - Légicom N°32
5627 mots
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(2) Décision de la Commission du 21 septembre1998, déclarant compatible une opération deconcentration (IV/M.1219 Seagram/Polygram).
(3) Décision de la Commission du 2 septembre2002, déclarant compatible une opération deconcentration (COMP/M2883 Bertelsmann/Zomba).
(4) Voir notamment Grégoire Poussielgue, « AlainLevy: L'acquisition de Warner Musicaccélérerait la stratégie d'EMI », Les Échos,20 novembre 2003, p. 23 ; Isabelle Repiton, « EMImise sur Warner Music pour se transformer », LaTribune, 20 novembre 2003, p. 17.
(5) Alors que EMI proposait de racheter Warner1,7 milliard d'euros, Edgard Bronfman en aoffert 2,6 milliards d'euros.
(6) Notification préalable d'une opération deconcentration (Affaire COMP/M.3333 Sony/BMG), JOCE C 13 du 17 janvier 2004, p. 15.
(7) Communiqué de presse de la Commissioneuropéenne IP/04/200 du 12 février 2004 etsuspension de la procédure, Les Échos,9/10 avril 2004, p. 24. À l'heure où le présentarticle est imprimé, la Commission vient juste defaire savoir qu'elle autorisait cette fusion sanscondition, confirmant ainsi l'analyse desavantages des effets tant horizontaux queverticaux effectuée ci-après.
(8) Décision d'autorisation de la Commission du2 septembre 2002, précitée.
(9) The Economist, 7 novembre 2003, « Britneymeets Michael ».
(10) Livre blanc sur la concentration du marché dudisque en France et ses effets négatifs sur ladiversité musicale.
(11) Grégoire Poussielgue, « Sony BMG: lesopposants espèrent une enquête approfondie deBruxelles », Les Échos, 30 janvier 2004, p. 26 ;Stephen Hornsby, Isabelle Wekstein « Furtherrecorded music industry consolidation/Theviewpoint of the independants » ; IAEL 2004,Back to the future, Five Eight 2004, p. 105à 119.
(12) Décision 2000/276/CE de la Commissiondu 22 septembre 1999 déclarant uneconcentration incompatible avec le marchécommun et avec l'accord EEE (AffaireIV/M.1524 Airtours/First Choice).
(13) TPICIC 6 juin 2002, aff. T-342/99, Airtoursplc c/ Commission.
(14) Lignes directrices sur l'appréciation desconcentrations horizontales au regard durèglement du Conseil relatif au contrôle desconcentrations entre entreprises, JOCE C 31 du5 février 2004, p. 5 et s.
(15) Idem.
(16) Ibidem, point 39.
(17) Le 5 octobre 2000, la notification devant laCommission a été retirée et l'opérationabandonnée, suite semble-t-il à une décision depassage en phase 2 (enquête approfondie en vuenotamment de définir les remèdes susceptiblesde rendre la concentration compatible avec lemarché commun) prise par la Commission le14 juin 2000.
(18) Voir notamment Le Figaro Économie,25 novembre 2003, Emmanuel Torregano, « Leconsortium emmené par Edgard Bronfman Jrrachète Warner Music », p. XII.
(19) Décision n° 98-D-76 du Conseil de laconcurrence relative à la situation de laconcurrence dans le secteur du disque.
(20) Décision de la Commission déclarant uneopération compatible avec le marché commun,du 19 juin 2000.
(21) Communiqué de presse de la CommissionIP/04/337, le 15 mars 2004 : « La Commissionautorise RTL à acquérir le contrôle exclusif deM6 ».
(22) Europolitique n° 2820 du 15 novembre2003, p. III.1, Music & Copyright, n° 268 du18 février 2004, p. 1 et 4, « Sony andBertelsmann's SBMG joint venture faces a fourmonth EC investigation ».
(24) TPICE 6 juin 2002, aff. T-342/99, Airtoursplc c/Commission.
(25) Communiqué du ministère, cité par EstelleDumont « États Unis : abandon de l'enquêteantitrust contre les majors du disque », ZDNetFrance, 29 décembre 2003.
(26) Communiqué de presse du 17 août 2001,IP/01/1212.
(27) Décision 00-D-70 du Conseil de laconcurrence du 31 janvier 2001 relative à lasituation de la concurrence dans le secteur dudisque à Paris, décision 98-D-76 du Conseil dela concurrence relative à la situation de laconcurrence dans le secteur du disque, avis 97-A-18 relatif à une demande d'avis du ministredélégué aux Finances et au Commerce extérieurconcernant l'application de l'article 01-1 del'ordonnance au secteur du disque, et même, àtitre historique, avis de la commission techniquedes ententes et des positions dominantes du17 mai 1977 sur la situation de la concurrencedans le secteur de la production et la distributiondes phonogrammes.
(28) Décision 00-D-70 du Conseil de laConcurrence précitée.
(29) Règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du16 décembre 2002 relatif à la mise en oeuvre desrègles de concurrence prévues aux articles 81et 82 du traité, JOCE L 1 du 4 janvier 2003, ainsique les textes adoptés formant le paquetmodernisation disponibles sur le site de laCommission à l'adresse suivante :http://www.europa.eu.int/comm/competition/antitrust/legislation
(30) Communiqué de presse du 17 août 2001,IP/01/1212.
(31) L'établissement d'un oligopole au sensjuridique du terme nécessite d'apporter la preuvenon seulement de la réunion de parts de marchéentre les mains d'un faible nombre d'entreprisesmais également d'une coordination de leurcomportement excluant une réelle concurrenceentre elles.
(32) TPICE 26 octobre 2000, Bayer AGc/ Commission, T-41/96, et CJCE 6 janvier 2004,C-02/01 et 3 janvier.
(33) Frédéric Goldsmith, Christophe Pecnard,« Record distribution and competition law inFrance », « The Impact of competition law onthe music industry », Reports presented at theInternational Association of EntertainmentLawyers Midem 1997, Eric Lauvaux, JulianTurton, 1997, p. 78 à 94.
(34) Loi nº 2001-1168 du 11 décembre 2001,Journal officiel du 12 décembre 2001.
(35) Circulaire du 16 mai 2003 sur lanégociation commerciale entre fournisseurs etdistributeurs, Journal officiel du 25 mai 2003.
(36) Christophe Pecnard, Emmanuelle Voisset,« Circulaire Dutreil : les périls de la négociationcommerciale (ou toujours la même histoire de lamontagne et de la souris) », Les Petites Affichesn° 191 du 24 septembre 2003, p. 4 à 8.