La définition du droit naturel à la libre communication des pensées et des opinions contenue dans l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme, sur lequel s'est appuyé le législateur français pour rédiger la loi du 29 juillet 1881, est bien proche de la définition objective de la liberté d'expression énoncée par le texte moderne de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme. De plus en plus, des contentieux fondés sur les dispositions de la loi de 1881 se trouvent confrontés à la vision de la Cour EDH de la liberté d'expression. Les dispositions françaises consacrées aux journaux et écrits périodiques rédigés en langue étrangère ou de provenance étrangère, ou au délit d'offense envers chef d'État étranger, ont ainsi été jugées non-conformes à la CEDH. Si d'autres articles de la loi de 1881 n'ont pas encore été mis à l'épreuve de la Convention, la jurisprudence antérieure de la Cour EDH laisse penser qu'ils ne résisteraient pas à son analyse, eu égard à la manière limitative dont elle envisage les restrictions à la liberté d'expression. Ainsi, il est intéressant d'étudier l'offense envers le Président de la République, le délit de divulgation de fausses nouvelles, les règles relatives au secret de l'instruction, la haine raciale ou l'injure et la diffamation, la responsabilité pénale des directeurs de publication et la procédure civile à la lumière de l'article 10 de la Convention.
Henri Leclerc
Avocat honoraire
1er juillet 2002 - Légicom N°28
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(2) En fait, elle l'a ratifiée le 31 décembre 1973et elle a été publiée par un décret du 3 mai 1974alors que M. Poher assurait l'intérim de laPrésidence de la République après le décès deGeorges Pompidou.
(3) CEDH Bozano c/ France.
(4) Par exemple, deux arrêts essentielsSundayTime c/ RU du 26 avril 1973 (A. 30) ouHandyside c/ RU du 7 décembre 1976 (A. 24).
(5) « La loi de 1881, Loi du XXIe siècle », Actesdu colloque de l'association Presse-Liberté du30 juin 2000, p. 10.
(6) CEDH, 21 janvier 1999, Roire et Fressoz c/France, Gazette du Palais, 25-27 juillet 1999,p. 18, Rev. sc. crim., 1999, p. 630.
(7) JO débats du 18 juillet 1880, p. 8291.
(8) Carbonnier, « Le silence et la gloire », D.1951, chronique p. 2 8.
(9) Rappelons à ce sujet que les intérêts àprotéger varient légèrement selon la nature desdroits qui ne sont pas indérogeables, qu'ils'agisse de la protection de la vie privée, prévueà l'article 8, de la liberté de pensée, deconscience et de religion de l'article 9 ou de laliberté de réunion et d'association de l'article 11.
(10) CEDH, Ekin c/ France du 17 juillet 2001,Légipresse 185-III, p. 169, note EmmanuelDerieux, D. 2002, p. 2770, obs. Th. Massis.
(11) JO du débat du 25 janvier 1881, p. 52.
(12) CE, 17 décembre 1958, D. 1858, p. 175,concl. Braibant.
(13) Cass. crim., 6 mai 1959, Bull. crim. n° 233.
(14) AJDA 1998, p. 374, note M.-F. Verdier,Jur. class. Communication, fasc 2150 n° 18 à 27,Emmanuel Dreyer.
(15) Les requérants avaient également soulevétant devant le Conseil d'État que devant la Coureuropéenne l'incompatibilité combinée avecl'article 14 de la CEDH qui interdit toutediscrimination fondée notamment sur l'originenationale ou l'appartenance à une minoriténationale. Mais la Cour n'a pas estimé nécessaired'examiner ce moyen.
(16) Cass. crim., 22 juin 1999, Légipresse n° 165-III,p. 138; Cass., 2e civ., 28 septembre 2000; Cass., 2eciv., 28 septembre 2000, B. civ. II n° 136; TGI Paris,20 juin 1990, Légipresse 1991.I.7; 21 novembre1995, Légipresse 1996.I.39; 18 décembre 1996.Légipresse 97.I 36; 18 février 1997, Légipresse97.I.54; 18 février 1998. Légipresse 98 I.88.
(18) TGI Paris, 25 avril 2001, Légipressen° 182-III, p. 103, commentaire M.-N. Louvet.
(19) CEDH, 25 juin 2002, Colombani et autres c/France, Légipresse n° 195-III, p. 159, note HenriLeclerc ; D. 2002, p. 2767, obs. J.-Y. Dupeux;D. 2992, p. 2571, obs. J.-F. Renucci
(20) CEDH, 24 avril 1990, Kruslin et Hévig c/France, constatant la non conformité à l'article 8de la Convention de la législation française surles écoutes téléphoniques, puis Cass. crim.,15 mai 1990 ; Bull. crim. n° 113 résistant envalidant la même écoute téléphonique que cellesur laquelle avait statué la CEDH; et enfin loi du10 juillet 1991 organisant et réglementant lesystème judiciaire et administratif des écoutestéléphoniques en France.
(21) Cour d'appel Paris, 3 juillet 2001.
(22) CEDH, 17 octobre 2000, Du Roy et Malauriec/ France, Légipresse n° 177-III, p. 195, obs.Marc-Noël Louvet ; Petites Affiches, 18 avril2001, note E. Derieux.
(23) Cass. crim., 19 mars 1996, Bull. crim. n° 117.
(24) L'article 11 protège le secret de l'instructionmais le problème de sa violation qui expose auxsanctions du délit de violation du secretprofessionnel concerne ceux qui concourent àl'instruction. Celui de la publication desinformations pose, lui, la question du recel desinformations ou des documents que nousévoquerons plus loin. Quant à l'article 91, ilpermet d'obtenir des dommages-intérêts en cas deplainte avec constitution de partie civile abusive.
(25) Cass. crim., 14 juin 2000, Bull. crim.n° 223.
(26) Cass. crim, 16 janvier 2001, Bull. crim.n° 10 et Légipresse n° 181-III, p. 80, noteEmmanuel Derieux.
(27) Cour d'appel Paris, 31 octobre 2001,Légipresse n° 189-III, p. 31, note EmmanuelDerieux.
(28) Voir jurisprudence précédemment citée.
(29) C'est-à-dire pas seulement aux exigences dela liberté d'expression mais également à cellesdu procès équitable et à celles de la légalité desincriminations. Cass. crim., 20 février 2001, D.2001, p. 3001, D. 2002, p. 1793, note B. Lamy.
(30) TGI Paris, 10 septembre 1996, Légipressen° 138-III, p. 7 note, E. Derieux ; D. 1997,somm., p. 91, obs. T. Hassler.
(31) Cour d'appel Paris, 18 septembre 1997,Gazette du Palais 1997.2, p. 697 ; D. 1998,somm., p. 82, obs. J.-Y. Dupeux.
(32) Cass. crim., 4 septembre 2001, BC n° 170 ;Légipresse 2001 n° 186-III, p. 183, noteB. Ader ; Rev. sc. crim. 2002, p. 125, obs.Francillon.
(33) TGI Paris, 15 décembre 1998, Légipresen° 158-III, p. 16, note E. Derieux ; CA Paris,29 juin 2000, Légipresse n° 176-III, p. 174 ;Cass. crim., 16 janvier 1996, BC 1996 n° 204 ;Conseil d'État, 2 juin 1999, Rec. Lebon, p. 160.
(34) Cour d'appel de Paris, 23 mai 2002, D.2003 somm., p. 174, obs. Bertrand de Lamy.
(35) Jean Paul Doucet, « La Convention européenne et la jurisprudence pénale française », Rev. sc. crim., p. 177.
(36) JO Débats, séance du 15 février 1881, JO,p. 248.
(37) J. Robert, « Propos sur la liberté de lapresse », D. 1964, chr. p. 194.
(38) Cass. crim., 13 juillet 1960, Bull. crim.n° 375.
(39) Cass. crim., 31 mai 1975, D. 1965 p. 645.
(40) Lingens c/ Autriche du 8 juillet 1986 A n° 103.
(41) Schwabe c/ Autriche du 28 août 1992 An° 242 B.
(42) Cass. crim, 16 mai 1954, Bull. crim. n° 111 ;CA Paris, 18 mai 1988, D. 1990, p. 35 ; Cass.
(43) Cass. crim., 28 avril 1950, Bull. crim.n° 137.
(44) TC Lille, 4 février 1959, JCP 1959, IV,p. 131.
(46) TGI Toulouse, 22 juin 2002, D. 2002,p. 2972, note C. Lienhart.
(47) Un arrêt assez récent de la Cour de Paristente d'expliquer en parlant de « désordre, depanique, d'émotion collective et de désarroi »,Droit pénal 1998, n° 63.
(48) CEDH 26 avril 1995 Prager c/ Autriche A 313.
(49) Ce texte mentionne encore les actesd'accusation disparus de la procédure pénaledepuis bientôt cinquante ans.
(50) Cass. crim., 22 juin 1999, Bull. crim.n° 146 ; Rev. sc. crim., 2001, p. 178
(51) Cour d'appel Paris (11e ch.), 16 juin 1999,D. 2000, p. 167, com. Ch. Bigot ; Cass. crim.,19 juin 2001, Bull. crim. n° 149 ; Rev. sc. crim.2002, p. 119, obs. J. Francillon.
(52) Rappelons le tout de même « La presse et lalibrairie sont libres ».
(53) Weber c/ Suisse, 22 mai 1990, A. 177.
(54) Cass. crim., 19 juin 2001, Bull. crim.n° 149.
(55) Quoi qu'il ne semble pas qu'on se soitinterrogé lorsqu'une jeune fille et sa mèrecherchèrent à établir post mortem une filiationavec le chanteur Yves Montand.
(56) Emmanuel Dreyer, Droit de l'information,n° 227.
(57) Séance du 25 janvier 1881, JO débats,p. 57 et s.
(58) Cass. crim, 14 juin 1995, Bull. crim. n° 217.
(59) Jersild c/ Danemark, 23 septembre 1994, An° 298, RTDH 1999, p. 375, note Cohen-Jonathanet Gazette du Palais, 1995 2 697.
(60) Cass. crim., 23 février 1993, Bull. crim.n° 86.
(61) Cass. crim., 20 décembre 1995, Bull. crim.n° 424.
(62) Lehideux et Isorni c/ France, 23 septembre1998, Rev. trim des droits de l'homme 1999,p. 367 ; Rev. sc. crim. 1999, p. 151 ; D. 1999,p. 223.
(63) Kruslin C/ France (précité).
(64) Rapport de M. Lisbonne, séance du18 juillet 1880, JO p. 8307.
(65) Lingens c/ Autriche, 8 juillet 1986, A n° 103.
(66) Cas. ch. mixte, 24 novembre 2000, Bull. civ.n° 4 ; voir aussi cour d'appel Paris, 20 septembre2001, D. 2002, p. 2300.
(67) Note Mimin sous Cass. crim, 27 octobre1938, D. 1939-I, p. 77.
(68) CEDH, 2 mai 2000, Bergens Tidende c/Norvège, Légipresse n° 176-III, p. 174.
(69) CEDH, 26 avril 1995, Prager c/ Autriche,A. 313.
(70) Cass. crim, 9 juillet 1980, Bull. crim.n° 219 ; 11 juin 1981, Bull. crim. n° 195.
(71) Castells c/ Espagne, 23 avril 1992, A. n° 236.
(72) Barford c/ Danemark, 22 février 1989,A. n° 149.
(73) Thorgeir Thorgeirson c/ Islande du 25 juin1992 A n° 239.
(75) Emmanuel Dreyer, Droit de l'information,Litec n° 339 à 342.
(76) CEDH, 7 octobre 1988, Salabiaku c/ France,A. 141.
(77) Rapport de M. Lisbonne, séance du18 juillet 1881, JO débats p. 8304.
(78) Cass. crim., 8 avril 1895, D. 1895- I, p. 360.
(79) Cass. civ., 5 février 1992, BC II n° 44 ; D.1992-J, p. 442 ; 22 juin 1994 BC II n° 164 ;19 février 1997 BC II n° 174 ; JCP 1997 II 22900et surtout l'étude exhaustive de Monsieur leConseiller Guerder, doyen de la deuxièmechambre au Rapport de la Cour de cassation1999, L'évolution récente de la jurisprudencecivile en matière de presse.
(80) L'audition de témoins à l'audience endehors des règles de l'enquête civile estparticulièrement audacieuse.
(81) Il énonce le droit à un recours effectiflorsqu'un droit a été violé.
(82) « Le silence et la gloire », D. 1951.Chronique p. 28.
(83) Cass. Ass. Plen., 12 juillet 2000, Bull. Ass.Plen. 2000 n° 8; D. 2000 somm., p. 463Légipresse n° 175-III, p. 153, conclusionsPremier avocat général Joinet.
(84) Voir TGI Paris, 16 novembre 2000, D. 2000somm., p. 2766 note Massis.
(85) Cass. crim, 11 mars 1977, Bull. crim. n° 96,le déclarant compatible avec l'article 10.
(86) Que le tribunal de Paris (17e chambre) a ditne pas pouvoir appliquer aux organes de presseen raison des dépositions de l'article 10 ;Légipresse n° 184-III p. 148.
(87) On se souvient de l'interdiction del'hebdomadaire Hara-Kiri Hebdo pour un titrehumoristique provocateur rapprochant le dramede l'incendie d'un dancing ayant fait descentaines de morts et le décès du général deGaulle en vertu des dispositions de l'article 14qui comment ne pas penser à l'article 14 de laloi de 1881 ? permet d'interdire l'expositiondes publications dont il estime qu'ellesreprésentent un danger pour la jeunesse
(88) Voir TGI Paris (31e chambre) du 16 mars2001 déclarant la poursuite compatible avecl'article 10, Légipresse 2001-III, p. 151.