Considéré comme une « expropriation pour cause d'utilité publique du propriétaire d'un journal des colonnes de son propre journal», l'exercice du droit de réponse dans la presse écrite périodique est très précisément encadré par l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881. La demande d'insertion d'un droit de réponse, le délai dans lequel elle est présentée, les termes et la taille de la réponse, doivent ainsi répondre à des exigences strictes. La jurisprudence reconnaît le droit de réponse comme un droit « général et absolu», qui serait même « discrétionnaire» puisque son auteur, mis en cause dans un article, fixe lui-même les termes de sa réponse. Cependant, le contenu de la réponse peut parfois être abusif et justifier un refus d'insertion. Il en est ainsi des assertions contraires à l'ordre public, aux bonnes murs ou à « l'intérêt légitime des tiers». Les réponses qui comportent des insertions contraires à l'honneur ou à la considération du journaliste auteur de l'article en cause, et celles qui manquent de pertinence et d'adéquation avec la mise en cause sont également rejetées. n
Traditionnellement mal ressenti par la presse, l'éditeur le considérant comme une expropriation des pages de son journal (1), et la rédaction comme une forme d'autocritique forcée, le droit de réponse est inscrit dans notre législation depuis la loi du 9 juin 1819 (2).S'il s'énonce le plus souvent au singulier, le droit de réponse a été étendu, par des réformes postérieures de la loi à d'autres personnes que celles prévues dans la rédaction d'origine de la loi de 1881, puis hors ...
Basile Ader
Avocat au Barreau de Paris
1er juillet 2002 - Légicom N°28
5858 mots
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(2) La jurisprudence consacre d'ailleurs le droit deréponse comme une « expropriation pour caused'utilité privée du propriétaire d'un journal descolonnes de son propre journal », Cour d'appelde Lyon, 13 novembre 1950, Dalloz 1951, 191.
(3) L'article 8 de la loi du 9 juin 1819, puisl'article 11 de la loi du 25 mars 1922, puisl'article 9 de la loi du 9 septembre 1835, puisl'article 13 de la loi du 27 juillet 1849, et enfinl'article 19 du décret du 17 février 1852, avantl'article 13 de la loi du 29 juillet 1881.
(4) Le droit de rectification n'a été limité dans salongueur au double de l'article qu'à l'issu desdiscussions parlementaires au Sénat (15 février1881). Il était dans le projet initial non limité.
(5) Voir cour d'appel de Paris, 30 janvier 1986,Jurisdata n° 021223.
(7) Cour de cassation, ch. crim., 22 mars 1960,Bull. Crim. n° 1 60 et voir l'article deC. Chamagne, p. 33.
(8) La 1re décision est celle du tribunal de Paris du5 février 1992, Gazette du Palais 92.1, p. 169. Voirégalement l'article de X. Agostinelli p. 35.
(9) Cour de cassation, ch. crim, 21 janvier 1997,Légipresse n° 140, III, p. 33, note B. Ader.
(10) Décret n° 87-246, Journal officiel, 7 avril 1987.
(11) Voir « La relation justice-média après la loidu 15 juin 2000 », Basile Ader, Revue sciencecriminelle, janvier-mars 2001, p. 71.
(12) Voir à ce sujet l'exposé conjoint fait parMaître Martine Coisne et M. Jean Colin, chef duservice contentieux de TF1, « Le droit deréponse dans la communication audiovisuelle »,Liberté de la presse et droit de la personne,Édition Dalloz 1997, p. 17.
(13) Prévu à l'article 13 (sans doute le choix dece numéro n'est-il pas dû au hasard ?) du projetde loi sur la société de l'information, dont ladiscussion est pour l'instant suspendue depuisles dernières élections législatives.
(14) B. Ader, Légipresse n° 165, II, p. 123« Évolution de la notion de publication : de lapresse écrite à l'internet ».
(15) TGI Paris, 5 juin 2001, Légipresse n° 194,septembre 2002, p. 146, note Cyril Rojinsky.
(16) TGI Paris, 5 juin 2002, ibidem.
(17) Cité au Dalloz 1881, 8e et 9e cahiers, 4epartie, p. 70.
(18) Cité au Dalloz 1881, ibidem.
(19) La formule est de l'arrêt de principe de lachambre criminelle du 12 juillet 1884, Dalloz1886.1.47.
(20) De Roets, « Les droits discrétionnaires : unecatégorie juridique en voie de disparition ? »,Dalloz 1997, chronique p. 92.
(21) Yves Mayaud : « L'abus de droit en matièrede droit de réponse », (Liberté de la presse etDroits de la personne, Dalloz 1997, p. 5) et Courde cassation, ch. crim., 28 avril 1932, Bull. crim.n° 117.
(22) Note Yves Mayaud, op. cit. p. 10.
(23) Cour d'appel de Paris, 17 avril 1996, Juliec/ Le Pen, Dalloz 1997, sommaire 75,observation Bigot.
(24) Notamment rappelée par la cour d'appel deParis le 15 janvier 1997, Bulletin d'info de laCour de cassation, 1997, p. 724.
(25) Voir infra.
(26) Voir Yves Mayaud, « L'abus de droit enmatière de droit de réponse », précité, Jean-YvesMontfort, « Le droit de réponse », Gazette duPalais, 23 au 24 mai 1997, p. 27 et suivantes etPatrick Auvret, « L'évolution des droits deréponse de la presse écrite à Internet », Gazettedu Palais, 17 au 19 juin 2001, p. 3.
(27) Voir par exemple Cour de cassation, ch.crim., 16 janvier 1996, Bull. crim. n° 26, Dalloz1996, jurisprudence p. 462, note ChristopheBigot.
(28) Voir Emmanuel Dreyer, Droit del'information et responsabilité pénale desmédias, Litec 2002, n° 59.
(29) Cour de cassation, ch. crim., 4 septembre2001, Bull. crim. n° 8, et voir infra II-C.
(30) Voir infra note 5.
(31) Qui, cela étant, mériteraient parfois d'êtrerelues par les personnes qui tentent de voirinsérer une réponse dans la presse périodique !
(32) Voir notamment Cour de cassation, ch.crim., 22 février 2000, Bull. crim. n° 77.
(33) Voir par exemple Cour de cassation, ch. civ.2e, 29 avril 1998, Dalloz 1998, p. 140.
(34) Ce délai de trois jours est porté à 24 heurespour les journaux quotidiens « pendant toutepériode électorale » et le délai de citation sur refusd'insertion est réduit à 24 heures ainsi que le prévoitl'alinéa 9 de l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881.
(35) « Vous attaquez dans tel endroit, on vousrépondra au même endroit ; cela paraît être lajustice élémentaire ! », intervention deM. Laboulaye, à la séance du Sénat du 9 juillet1881, cité au Dalloz 1881, ibid.
(36) Cour de cassation, ch. crim., 27 mai 1999,Bull. crim. n° 113.
(37) Cour de cassation, ch. crim., 27 mai 1999,Bull. crim. n° 113.
(38) Cour d'appel de Dijon, 30 mai 1996,Légipresse, n° 142, I, p. 62.
(39) Voir article 6 de la loi du 29 juillet 1881 etle décret d'application du 6 avril 1987.