Fondé sur la notion d'exclusivité, le droit d'auteur peut sembler à premier abord l'ennemi du droit de la concurrence. Pourtant, la jurisprudence semble de plus en plus faire converger ces droits aux finalités à priori opposées. Cette tendance s'est particulièrement affirmée dans le secteur audiovisuel, terrain privilégié des conventions exclusives, où le droit de la concurrence est parfois utilisé pour protéger les principes fondamentaux du droit d'auteur ainsi que ses titulaires, afin notamment de lutter contre la non effectivité de l'obligation d'exploitation et d'assurer l'efficacité de la rémunération proportionnelle.
LE DROIT DE LA CONCURRENCE, meilleur ami du droit d'auteur. Cette proposition peut étonner si l'on s'en tient à la lecture des ouvrages de propriété littéraire et artistique qui dénoncent plutôt l'emprise grandissante, voire les attaques de la législation économique tant nationale que communautaire.Le droit d'auteur est en effet fondé sur une notion suspecte aux yeux des partisans du libre marché : l'exclusivité. Cette exclusivité se retrouve aussi bien dans le rapport privatif qui ...
Benjamin MONTELS
Benjamin Montels Docteur en droit, Centre de droit des affaires de la Faculté ...
1er avril 2001 - Légicom N°25
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(2) J.-M. Mousseron, Technique contractuelle,éditions Francis Lefebvre, 2e éd., n° 1144.
(3) 324, pourvoi rejeté par Com., 21 juin 1994,BOCCRF 16 sept. 1994. 391, JCP éd. E. 1994.IV. 2104, qui précise que les notions d'ententeet d'abus de position dominante « ne sont pasexclusives l'une de l'autre ». V. égal., confirmantla décision du Conseil de la concurrencequant au montant des sanctions pécuniaires :Paris, 28 oct. 1992, BOCCRF 4 déc. 1992. 359,RTD com. 1993. 600, obs. Bouzat.
(5) CJCE, 6 oct. 1982, Coditel II, Rec. 1982.3381, concl. Reischl, RIDA janv. 1983. 120, obs.Françon, D. 1985. Somm. 275, obs. Gavalda etLucas de Leyssac, JCP éd. E. 1984. II. 13389,obs. Blaise et Bonet, RTD Com. 1982. 558, obs.Françon, RTD eur. 1983. 297, obs. Bonet.
(6) V. Ripert et Roblot, Traité élémentaire de droitcommercial, t. 1, LGDJ, 17e éd. par M. Germainet L. Vogel, n° 429; J.-M. Mousseron, Techniquecontractuelle, préc., n° 1148. La jurisprudencetraditionnelle n'annule que les conventions necontenant aucune de ces restrictions mais cettestipulation cumulative apparaît plus conforme àla tendance contemporaine (v. F. Dekeuwer-Défossez et E. Blary-Clément, Droit commercial,Montchrestien, 6e éd., n° 555). En raison deson caractère dérogatoire à la liberté du commerce,elle pose aussi un principe d'interprétationrestrictive de l'exclusivité, (V. J. Ghestin,Ch. Jamin et M. Billiau, Traité de droit civil, Leseffets du contrat, LGDJ, 3e éd., n° 38; Ph. Simler,J. cl. Civ., art. 1156 à 1164, fasc. 20, Contrats etobligations, Interprétation des contrats, La miseen uvre: rôle des juges du fond et de la Courde cassation, n° 26).
(7) V. L. Vogel, Droit de la concurrence et puissanced'achat : Plaidoyer pour un changement,JCP éd. E. 1997. I. 713 ; avec J. Vogel, Les rapportsproducteurs/distributeurs : Un nouveléquilibre ? Dalloz aff. 1996. 938.
(8) Sur ce rapport de force favorable aux diffuseurs,v. notre thèse, Les contrats de représentationdes uvres audiovisuelles, dactyl., ParisII, 2000, n°s 198 à 201 (à paraître aux Pressesuniversitaires d'Aix-Marseille).
(15) Rapport de la Commission de la concurrencepour 1980, p. 223. Adde rapport pour1984, p. 11.
(16) V. E. Claudel, « Le consentement en droitde la concurrence : consécration ou sacrifice ? »,in Le droit civil des affaires : rôle et place desmécanismes fondamentaux du droit civil en droitdes affaires, RTD com. 1999, p. 291, spéc. n°s 4et s. Cette conception extensive semble progressivementimprégner la jurisprudence civile quiadmet désormais qu'une dépendance économiquepuisse être à l'origine d'un vice duconsentement : v. not. Paris, 12 janv. 2000, RIDAoct. 2000. 243, obs. Kéréver, D. 2001. 2067,note Fadeuilhe, JCP 2000. II. 10433. note Pierre,ibid. 2001. I. 330, obs. Loiseau, Com. com. élec.avr. 2000. 22, note Caron (annulation d'une cessionde droits par un créateur salarié, non passur le fondement du droit spécial des contratsd'auteur mais sur celui de la violence de l'art.1112 du code civil).
(19) BOCCRF 26 mars 1993. 95, pris après l'avisdu Conseil de la concurrence, du 12 janv. 1993,ibid. 96 ; BOCCRF 9 févr. 1994. 53, pris aprèsl'avis du Conseil de la concurrence, du 29 juin1993, ibid. 54.
(20) BOCCRF 21 janv. 1999. 7.
(21) BOCCRF 25 août 1999. 439, D. 2000.Somm. 202, obs. Hassler et Lapp, Gaz. Pal.
(23) Adde le décret du 9 juillet 2001, pris pourl'application du 3° de l'art. 27 et de l'article 71de la loi de 1986 modifiée, qui exige notamment,pour que les dépenses d'une chaîne soientcomptabilisées dans son obligation d'investissementau profit de la production indépendante,que les droits acquis en exclusivité n'excèdentpas 18 mois (JO 11 juill. 2001. 11073).
(24) Cf. supra, note 19.
(25) Depuis, le bouquet de télévision par satelliteTPS s'est au contraire engagé, dans un accord collectifpassé en mars 1999 avec les organisationsprofessionnelles de producteurs, à une exploitationeffective et non exclusive de l'intégralité desfilms français par paiement à la séance.
(27) CJCE, 6 avr. 1995, JCP éd. E. I. 582. 16,obs. Wallet, RTD Com. 1995. 606, obs. Françon,RTD Eur. 1995. 835, obs. Bonet, ibid. 1996.746, obs. Blaise et Idot.
(28) En ce sens, v. H. Calvet et T. Desurmont,« L'arrêt Magill : un arrêt d'espèce ? », RIDAjanv. 1996, p. 3, spéc. p. 35 ; C. Caron, notesous trib. com. Paris, 8 janv. 1999, RIDA oct.1999, p. 218, spéc. p. 226.
(30) En ce sens, v. not. B. Edelman, « L'arrêtMagill : une révolution ? » D. 1996. Chron. 119,spéc. n° 21 ; G. Bonet, obs. sous l'arrêt duTpice, dans l'affaire Magill, en date du 10 juill.1991 (RTD Eur. 1993. 525, spéc. p. 529).
(31) V. les précautions prises dans les attendus del'arrêt Magill qui contraint le titulaire « d'un droitqualifié de droit d'auteur par le droit national» (att. 48) à accepter une demande de licenced'exploitation, car ici « son refus n'était justifié nipar l'activité de radiodiffusion télévisuelle ni parcelle d'édition de magazine » (att. 55). Adde lajurisprudence rendue postérieurement: TGIdu Havre, 19 déc. 1996, RIDA juill. 1997. 337:l'arrêt Magill ne concerne que « l'information depresse » et non la protection des phonogrammes.Rappr. l'art. 20-2 de la loi de 1986, inséré par laloi du 1er août 2000 afin de transposer l'article 3bis de la directive Télévision sans frontière, quiinterdit de réserver l'exclusivité de la retransmission« des événements d'importance majeure » àune chaîne qui ne serait pas accessible à « unepartie importante du public ». Cette dispositionqui concerne essentiellement les manifestationssportives est également justifiée par le droit àl'information du public (v. C. Caron, « La loi du1er août 2000 relative à la liberté de communicationet la propriété intellectuelle », Com. com.élec. oct. 2000, p. 10, spéc. n° 2).
(32) Sur les critiques de cette règle prônant uneégalité entre les uvres, quels qu'en soient « lemérite ou la destination » (art. L. 112-1 du CPI),v. not. P.-Y. Gautier, Propriété littéraire et artistique,PUF, Droit fondamental, 3e éd., nos 35et s. Cependant, le droit spécial des contratsd'auteur opère aussi des distinctions entre lesuvres quand il réglemente leur exercice :v., par ex., le régime moins protecteur accordépar le CPI aux auteurs d'uvres logicielles (art.L 113-9) ou publicitaires (art. L. 132-31).
(33) V., par ex., trib. com. Paris, ord. réf., 22 sept.1994 (inédit) qui condamne la société Gaumontà deux cent mille francs par jour de retard dans lafourniture d'une copie du film Léon de L. Bessonau profit d'un exploitant de Lyon qui s'obstinaitpourtant à maintenir le billet d'entrée à 29 francs(v. Les Échos 23-24 sept. 1994). Rappr. Crim., 31oct. 2000, Cont. conc. cons. 2001. n° 5. 14, noteMalaurie-Vignal, RJDA 2001. n° 643.
(34) Sur la condamnation prétorienne des prixprédateurs dans le cadre de l'abus de positiondominante, v. G. Semadeni, « Les offres ou pratiquesde prix abusivement bas et leurs sanctions», Cah. dr. entr. 1996, n° 5, p. 8, spéc.p. 9 ; F. Fournier, « Haro sur les prédateurs : larépression des abusivement bas », ibid. 1997,n° 1, p. 5, spéc. p. 6.
(35) V. J. Simon, « Les nouvelles orientations dudroit français de la concurrence : la lutte contreles pratiques déloyales », Dalloz aff. 1997. 652,spéc. p. 654.
(36) Rappr. l'avis déjà rendu par le Conseil de laconcurrence, le 8 juill. 1997, sur l'application del'art. L. 420-5 à un autre secteur culturel, celuidu disque : BOCCRF 17 sept. 1997. 639.
(37) Avis inédit, qui évalue qu'au-delà de la 65eentrée par spectateur (soit 5,4 entrées par mois),le prix de vente de la carte est inférieur au coûtvariable (versements acquittés par UGC pourchaque utilisation d'une carte par son titulaire,tels que le pourcentage distributeur ou les droitsSACEM, ainsi que les coûts de gestion dechaque carte). Quant à la position dominante dela société UGC, il ne l'exclut pas, en tout cassur un marché pertinent correspondant à Parisintra muros où elle totalise environ 40 % desentrées au 1er semestre 1999.
(38) BOCCRF 18 oct. 2000. 572, Légipresse
(39) Le Président du directoire de MK2 estimaitlui-même, pour justifier l'augmentation de20 francs de son Pass, que « le marché est enpasse d'instituer un véritable système de venteà perte » (La Tribune, 30 avr. 2001).
(40) Cette pratique a également entraîné unemodification du code général des impôts parl'art. 7 de la loi de finance rectificative pour2000 (JO 31 déc. 2000. 21172) qui a inséré,après l'al. 1er de l'art. 1609 duovicies relatif àla taxe perçue sur les places de cinéma qui alimentele compte de soutien à l'industrie desprogrammes, un al. ainsi rédigé : « le prix desbillets d'entrée s'entend du prix effectivementacquitté par le spectateur ou, en cas de formuled'accès au cinéma donnant droit à des entréesmultiples, du prix de référence par place surlequel s'engage l'exploitant de salle et quiconstitue la base de la répartition des recettesentre ce dernier et le distributeur et les ayantsdroits de chaque uvre cinématographique ».
(41) Ce sont sans doute ces contraintes qui ontobligé UGC à augmenter le prix de sa cartepassé à 108 francs en juill. 2001.
(42) Selon le titre d'un article de S. Toubiana(Libération, 26 mars 1992), qui appelle à « sebattre pour cette idée simple, qui animait AndréBazin, à savoir que les films naissent libres etégaux ».