Le titre d'un ouvrage peut faire l'objet d'une protection juridique, indépendamment de l'uvre à laquelle il fait référence. Cette protection permet à son auteur de s'opposer à toute réutilisation du titre, quelle que soit sa destination (uvre audiovisuelle ou radiophonique, slogan publicitaire, marque ). Trois catégories de protection sont envisageables. L'une, au titre du droit d'auteur lorsque le titre concerné présente un caractère original ; une autre par le droit des marques qui s'applique surtout aux ouvrages non littéraires et non uniques. La dernière protection concerne les titres dépourvus d'originalité ou tombés dans le domaine public ; elle se fonde sur l'existence d'un risque de confusion entre deux titres d'un même genre.
LE RÉGIME JURIDIQUE de la protection des titres des ouvrages suscite depuis de nombreuses années d'importants contentieux qui reflètent les difficultés auxquelles sont confrontés les éditeurs d'ouvrages.Cette question présente un intérêt certain puisque, non seulement le titre d'un ouvrage donne une indication essentielle sur son contenu en en constituant le prolongement et l'aboutissement, mais surtout, parce que c'est grâce à son titre qu'un ouvrage pourra être identifié et ...
Catherine CHAMAGNE
Avocat à la Cour.
1er janvier 2001 - Légicom N°24
7261 mots
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(2) Principe confirmé constamment par la jurisprudence,voir par exemple CA Paris,21 octobre 1992, à propos du titre The greenconsumer : « étant observé que le mérite de lacréation et la destination ou le genre del'ouvrage (guide) ne sont pas des critèresd'appréciation de l'originalité et que l'originalitédu titre d'une uvre de l'esprit ne doit pasêtre appréciée avec plus de sévérité que l'originalitéde l'uvre elle-même » (RIDA, p. 350).
(3) En pratique, les éditeurs réservent très souventles titres qu'ils ont choisis avant la publicationdes ouvrages, en les publiant dansLivres Hebdo, ce qui permet de donner unedate certaine aux titres arrêtés. Cette précautionest vivement recommandée, dès lors qu'en réalité,c'est très souvent la publication qui confèreune date certaine au titre créé.
(4) Voir par ex. reprise du titre de l'ouvrageModulor par l'enseigne : Abvent ModulorStudio (CA Bourges, 10 septembre 1996, RDPI,n° 71, janvier 1997, p. 65) et reprise du titre duroman Clochemerle par l'enseigne Auberge deClochemerle (CA Lyon, 5 juillet 1979, RIDA,p. 47).
(5) Voir par exemple pour la reprise du titre d'unpériodique Nana par une émission de télévisionintitulée Super nana (CA Paris, 27 février1998, PIBD, n° 655, III, 294).
(6) Cf. reprise du titre de la pièce de théâtre LePère Noël est une ordure par la campagnepublicitaire Cette année, le Père Noël n'est pasune ordure (TGI Paris, 24 septembre 1986,RDPI n° 8, décembre 1986, p.101).
(11) Cour de cassation (ass. plén.), 30 octobre1987.
(12) Voir par exemple CA Bourges, 10 septembre1996, affaire Modulor, préc., ou encoreCA Paris, 25 avril 2000, s'agissant de la protectiondu titre Dictionnaire du politiquementcorrect à la française (Gaz. Pal., 11 et 12 août2000, p. 24), et récemment TGI Paris, 30 juin2000, affaire La débandade (RIDA, p.311).Contra : Cour de cassation, 13 novembre 1984(titre : Les jeunes loups) qui se place aumoment où la protection est réclamée, de nombreusesannées après la création du titre, pourapprécier l'originalité ; cet arrêt a toutefois ététrès critiqué par la doctrine (Cour de cassation(1re ch. civ.), 13 novembre 1984, RIDA, n° 124,avril 1985, p.152).
(13) Préc.
(14) CA Bourges, 10 septembre 1996, préc.
(15) TGI Nanterre, 29 avril 1998, RDPI, n° 97,mars 1999, p. 27.
(16) TGI Paris (3e ch.), 18 mars 1998, n° 658-III-381.
(17) Cour de cassation (1re ch. civ.), 5 mai 1993,pourvoi n° 91-13.664 sur arrêt CA Paris(1re ch.), 18 décembre 1990.
(18) CA Paris, 19 novembre 1986, confirmé parCour de cassation, 3 novembre 1988, préc.
(19) Voir à titre d'exemple pour des titres demagazines : Soins (CA Paris, 27 février1995, Jurisdata n° 20555), Nitro (CA Paris,15 janvier 1999, Jurisdata n° 022682),Magazine 60 (CA Paris, 2 avril 1999,Jurisdata n° 23485), 4x4 Magazine (CAParis, 29 mars 2000, PIBD n° 704 III 413).
(20) TGI Paris, 15 juin 1972, RIDA, janvier 1973,p.151.
(21) TGI Paris, 6 mai 1987, RIDA n° 134, octobre1987, p.213.
(25) CA Paris, 8 juillet 1986, Dalloz, somm.Comm., p. 152.
(26) TGI Paris, 7 mai 1987, Cahiers du droitd'auteur, n° 1, janvier 1988, p. 15.
(27) Cour d'appel Paris, 21 octobre 1992, RIDA,p. 350.
(28) Cour de cassation (ch. comm.), 2 juin 1992,Sedexdoc c/ Le revenu français : « un titre dejournal peut constituer une marque à la conditionde ne pas utiliser de termes recouvrant parleur banalité l'objet même de la publication oud'y associer des éléments permettant de la distinguerdes publications concurrentes ».
(29) Mathély, Le nouveau droit français desmarques, p. 52. Pour le Professeur Colombet,« si le titre d'une collection (La Pléiade parexemple) peut être déposé comme marque servantà désigner une catégorie d'ouvrages, letitre d'un livre ne peut l'être, car chaque livreconserve son entité propre ; la marque n'estdonc pas qualifiée pour le distinguer, parce quela création littéraire et artistique se situe avantla circulation des volumes ou des films qui ressortissentau commerce » (JurisclasseurConcurrence, Consommation, fascicule 200,titres d'ouvrages et publications périodiques,n° 3).
(30) Cass. com. 4 octobre 1976 et 5 juillet 1977.
(31) Voir l'affaire L'Atlas des vins, cité plus loinsur le fondement du droit des marques, les tribunauxayant refusé de reconnaître la contrefaçonde marque du titre « L'Atlas des vins deFrance » par « Atlas Hachette des vins deFrance » en raison de la présence du nomHachette.
(32) CA Paris, 18 juin 1999, Jurisdatan° 024086.
(33) Voir arrêt de principe, CA Paris, 14 avril1960 à propos de reprise du titre du roman Lesliaisons dangereuses pour une adaptation enfilm : « ils n'en appartiennent pas moins aumême genre quand, sous un titre rigoureusementidentique, les images, les dialogues et lesscènes de films illustrent le même texte, lamême pensée et la même intrigue ».
(34) CA Paris, 15 mars 1994, Jurisdata n° 020777.
(35) CA Paris, 4 avril 1995, Jurisdata n° 021624.
(36) CA Paris, 10 mars 1999, Jurisdatan° 023487
(37) TGI Paris, 15 juin 1972, préc.
(38) TGI Paris, 6 mai 1987, préc.
(39) CA Paris, 7 mars 1990, Jurisdatan° 042841
(40) TGI Paris, 30 juin 2000, préc.
(41) TGI Paris, 11 décembre 1996, Jurisdata n°046941
(42) Claude Colombet, Jclasseur, op. cit., p. 5,n° 21.
(43) CA Paris, 30 avril 1990, Dalloz 1991, som.Com., p.89.
(44) Voir par exemple la reprise du titre de labande dessinée Shirley, TGI Paris, 21 mars1972, RIDA octobre 1972, p.148.
(45) In Mélanges offerts à Albert Chavanne,L'évolution de la jurisprudence sur la protectiondes titres d'uvres de l'esprit par la loi du11 mars 1957, p. 221.