La loi du 12 juillet 1990, loin de clarifier le statut des mannequins et des artistes-interprètes, n'a fait que créer de nouvelles incertitudes et engendre une insécurité juridique que ni les circulaires du ministère du travail, ni la jurisprudence, n'arrivent à dissiper. Quoiqu'il en soit, le statut des personnes participant à un film publicitaire devrait être unique. Il semble qu'en l'état actuel du droit, ce soit celui des mannequins qui doive s'appliquer.
Le législateur d'aujourd'hui est étonnant et, disons-le, décevant lorsque son intervention contribue à susciter l'insécurité juridique et le contentieux.Voulant clarifier le statut des enfants employés dans la publicité et celui de ces agences faisant commerce de la beauté, souci tout à fait louable compte tenu des abus qui pouvaient exister, il a créé des règles contraignantes qui ont la particularité d'être inapplicables et source d'une dangereuse insécurité juridique.On a là ...
François CORNE
Avocats au Barreau de Paris SCP Corone & Barassi
1er juillet 1995 - Légicom N°9
3850 mots
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(2) La définition du mannequin a fait l'objet d'uneattention particulière au cours des débats parlementaires.Le projet de loi présenté par le Gouvernementcomportait la définition suivante :Est considérée comme exerçant une activité de mannequin,toute personne qui est chargée soit de présenterpersonnellement au public, un message, un produit,des modèles ou nouveautés, notamment à l'occasionde défilés de mode ou par l'intermédiaire d'images, dephotographies, d'enregistrements visuels ou sonoresou de tout autre support audiovisuel, soit de poserpour une présentation quelconque, même si cette activitén'est exercée qu'à titre occasionnel. (v. doc.Sénat n° 208)En première lecture, cette définition a été simplifiéepar le Sénat, dans les termes suivants : Est considéréecomme exerçant une activité de mannequin, toutepersonne physique qui est chargée de présenter aupublic un produit ou un service, soit directement soitindirectement par reproduction de son image sur toutsupport visuel ou audiovisuel, même si cette activitén'est exercée qu'à titre occasionnel. (v. doc. Ass.Nat. n° 1347)L'Assemblée nationale a amendé cette définition afinde tenir compte des modèles qui posent et a voté, enpremière lecture, le texte suivant : Est considéréecomme exerçant une activité de mannequin, toute personnequi est chargée, soit de présenter au public,directement ou indirectement par reproduction de sonimage sur tout support visuel ou audiovisuel, un produit,un service ou un message, soit de poser pour uneprésentation quelconque ou pour une utilisation quelconquede son image, même si cette activité n'estexercée qu'a titre occasionnelle(v. doc. Sénat n° 361)En seconde lecture, le Sénat a ajouté le mot publicitaireaprès le mot message et a simplifié la suite dutexte en visant soit de poser comme modèle . (v.doc. Ass. Nat. n° 1505)L'Assemblée nationale est revenue sur ces modificationsen supprimant le mot publicitaire et a précisésoit de poser comme modèle avec ou sans utilisationultérieure de son image. (v. doc. Sénat n° 430)Finalement, c'est au sein de la Commission mixte paritaire qu'a été trouvé un accord tenant compte du souhaitdu Sénat de viser uniquement les messages publicitaires et de celui de l'Assemblée nationale de voir incluredans la définition, les modèles dont l'image n'est pas exploitée ultérieurement (v. doc. Sénat n° 429)
(3) La définition de l'artiste-interprète donnée par l'article 16 de la loi du 3 juillet 1985 (devenu article L 212-1du CPI) s'apparente à celle de l'article 3 de la Convention de Rome de 1961 selon laquelle : Aux fins de laprésente convention, on entend par : a) artistes-interprètes ou exécutants, les acteurs, chanteurs, musiciens, danseurset autres personnes qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent ou exécutent de tout autre manièreles uvres littéraires ou artistiques.
(4) Il n'existe pas de définition légale de l'artiste de complément mais, en revanche, différentes conventions ouaccords collectifs y font référence. Ainsi, la Convention collective du spectacle exclut de son champ d'applicationles artistes de complément et silhouettes en disposant : On entend par artiste-interprète, les personnes engagéesen qualité d'artiste dramatique, lyrique, chorégraphique, de variété, cascadeur, artiste de chur, tels que définisà l'article 12.1 de la présente convention, à l'exclusion des artistes de complément, silhouettes, chefs de file,doublures lumière et musiciens chanteurs. On entend par silhouette, l'artiste de complément dont le personnagedoit, pour les nécessités de la mise en scène, ressortir dans le champ de la caméra.La présente Convention Collective n'est pas applicable aux artistes de complément dits de figuration mêmes'ils sont appelés à réciter ou à chanter collectivement un texte connu, sous réserve que celui-ci ne nécessite pasplus de deux heures pour être su par cur. Il existe également un usage dans les domaines du théâtre et du cinéma selon lequel le rôle dévolu aux artistesde complément ne dépasse pas treize lignes de texte.Citons encore la Convention Collective des artistes-interprètes engagés pour des émissions de télévision du 31mai 1988 qui exclut de la catégorie des artistes-interprètes les artistes de complément, même s'ils sont appelés àréciter ou à chanter collectivement un texte connu.
(5) Il ne paraît pas possible, en effet, d'appliquer à une même personne et pour la même prestation : le statut desmannequins en droit du travail et celui des artistes-interprètes au regard de l'exploitation de sa prestation. La raisonen est simple, la loi du 12 juillet 1990, qui est incorporée dans le Code du travail, ne se contente pas deréglementer la relation employeur/mannequin, mais contient également des dispositions propres à la rémunérationdu droit à l'image des mannequins. Comment, des lors, décider qu'une partie de ces dispositions s'appliquera etnon l'autre, sinon de manière purement arbitraire ?
(6) Cass. Crim. 9/03/1993, GP. 1994,1, Jp. 126, note E. Segond et B. Fau
(7) Voir Paris 1 8è c, 27 janvier 1995 (Chaudat C/ Coccinelle, IPC et AD Films)
(8) Cette méthode d'analyse aboutit également à faire l'impasse sur la notion d'artiste de complément, la Courassimilant l'ensemble des artistes du spectacle (L 762-1 C. du travail) aux artistes-interprètes (L 212-1 du CPI),ce qui est inexact et revient, comme l'avaient souligné les juges dans l'affaire Téléma, à vider de son sens lanotion d'artiste de complément.