La liberté d'expression est consacrée par l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme qui expose dans son alinéa 1er un principe général de liberté, avant de poser dans un second temps des limites à l'exercice de celle-ci. L'articulation entre ces deux éléments ne se fait pas sans difficulté. En effet, la titularité de cette liberté impose à chacun dans ses modalités d'exercice, des devoirs et des responsabilités dont les contours restent malaisés à définir. C'est à la Cour européenne que revient alors le soin de trancher où commence et s'arrête le principe de la liberté d'expression, surtout lorsque cette prérogative rentre en concurrence avec d'autres libertés d'égale importance.
LA LIBERTÉ D'EXPRESSION représente une valeur essentielle des sociétés démocratiques. Elle en est, tout à la fois, une conséquence et un élément constitutif essentiel.Une telle liberté ne peut cependant être sans limites, devoirs et responsabilités. Voulant protéger et renforcer la liberté d'expression, telle que consacrée par l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme, la Cour européenne des droits de l'homme n'en oublie-t-elle pas, parfois, le nécessaire ...
(2) « Article 10.- Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droitcomprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer desinformations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiqueset sans considération de frontières. Le présent article n'empêche pas les Étatsde soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à unrégime d'autorisation.
(3) L'exercice de ces libertés ne peut être restreint par aucune forme de censure.
(5) Ces libertés ont pour limite: le respect des droits reconnus dans le présent Titre;les principes des lois qui le mettent en uvre et, particulièrement, le droit à l'honneur,à l'intimité, à l'image et à la protection de l'enfance et de l'adolescence.
(6) La saisie des publications, enregistrements et autres moyens d'informationne pourra être ordonnée que par décision judiciaire.»
(7) CEDH, 23 septembre 1994, Jersild c/ Danemark (voir notamment inDerieux, E.,Droit de la communication. Droit européen et international. Recueil de textes,Victoires Éditions, pp. 171-177).
(8) « Il est vrai qu'adressé publiquement à un homme politique, le terme trottel(idiot) peut offenser celui-ci. En l'espèce cependant, il paraît à la mesurede l'indignation suscitée par M. Haider. Quant au ton polémique de l'article que la Cour n'a pas à approuver , il y a lieu de rappeler que, outre la substancedes idées et informations exprimées, l'article 10 protège aussi leur mode de diffusion.» (CEDH, 1er juillet 1997, Oberschlick c/ Autriche, § 34).« La liberté journalistique comprend le recours possible à une certaine dosed'exagération, voire même de provocation.» (CEDH, 24 février 1997, de Haeset Gijsels c/ Belgique, § 46, voir notamment inDerieux, E., Droit de la communication.Droit européen et international. Recueil de textes, Victoires Éditions,pp. 179-186).
(9) Mahoney Paul, « Judicial activism and judicial self-restraint in the Europeancourt of human rights : two sides of the same coin », Human Rights Law Journal,1990, vol. 11, pp. 57-88.
(10) La télévision publique espagnole.
(11) « Article 20.- 1. Sont reconnus et protégés les droits :a) d'exprimer et de diffuser librement les pensées, les idées et les opinions, aumoyen de la parole, de l'écrit ou de quelque autre support ;b) à la production et à la création littéraire, artistique, scientifique et technique ;c) à la liberté d'enseignement ;d) de communiquer ou de recevoir librement une information vraie par quelquemoyen de diffusion que ce soit.Le droit à la clause de conscience et au secret professionnel sera régi par la loi.
(4) L'organisation et le contrôle parlementaire des moyens de communicationsociale dépendant de l'État ou d'un organisme public seront régis par la loi.Celle-ci garantira l'accès, à ces moyens, des groupes sociaux et politiques représentatifs,dans le respect du pluralisme de la société et des diverses languesen usage en Espagne.
(12) Paragraphe 46 de l'arrêt : « Pour se prononcer sur cette question, la Courtiendra compte en particulier des termes utilisés dans les déclarations, ducontexte dans lequel celles-ci ont été rendues publiques et de l'affaire dans sonensemble, y compris le fait qu'il s'agissait d'assertions orales prononcées lorsd'émissions de radio en direct, ce qui a ôté la possibilité, au requérant, de lesreformuler, de les parfaire ou de les retirer avant qu'elles soient renduespubliques.»
(13) Paragraphe 49 de l'arrêt : « Quant à la gravité de la sanction infligée aurequérant, la Cour constate que la TVE lui appliqua la sanction maximale prévue[ ] à savoir la résiliation du contrat de travail sans droit à indemnisation. Il estincontestable que cette sanction a revêtu, eu égard notamment à l'anciennetédu requérant dans l'entreprise et son âge, une sévérité extrême, alors qued'autres sanctions disciplinaires, moins lourdes et appropriées, auraient pu êtreenvisagées.»
(14) Paragraphe 48 de l'arrêt : « La Cour observe toutefois que les déclarationslitigieuses s'inscrivent dans le contexte particulier d'un conflit du travail opposantle requérant à son employeur suite à la suppression de l'émission dont ilétait responsable, doublé d'un large débat public concernant des questions d'intérêtgénéral relatives à la gestion de la télévision publique. Les propos litigieuxont été tenus dans le cadre de débats publics et passionnés sur de prétenduesanomalies dans la gestion de la TVE, service public de radio-télévision espagnol.»